C'est la “bonne nouvelle” apportée par Christophe Maurel, directeur de la Banque de France Saône-et-Loire, cet après-midi à la CCI lors d'une conférence intitulée “Recul de l’inflation, baisse des taux, ralentissement économique : bilan 2024 et perspectives 2025 pour les entreprises en BFC”. Si la France échappe à la récession, la Bourgogne-Franche-Comté et la Saône-et-Loire aussi. Ce qui n'empêche pas certains secteurs de souffrir.
Après un début de décennie marqué par une succession de chocs (Covid-19, guerre en Ukraine, crise énergétique, hyper-inflation), l’économie mondiale a résisté en 2024 et l’inflation a continué de refluer. Ainsi selon le FMI (WEO de janvier 2025), le PIB mondial a augmenté de 3,2 % en 2024. En ce qui concerne la Zone Euro, la croissance du PIB s’établit à 0,8 % en 2024, après une hausse de 0,4 % en 2023.
En France, sur l’ensemble de l’année 2024, la croissance du PIB s’établit à 1,1 % d’après les dernières estimations. Cela confirme le diagnostic selon lequel l’économie française parvient à résister malgré le choc inflationniste des dernières années, un contexte d’incertitude politique et un haut niveau de déficit public. La résilience de l’activité s’explique par le dynamisme du secteur des services, notamment dans l’hébergement-restauration, l’information-communication ainsi que dans les services aux entreprises et aux ménages. Ces secteurs ont fortement bénéficié des Jeux olympiques et paralympiques de Paris dont on estime l’impact macroéconomique à + ¼ point de croissance au troisième trimestre avec un contrecoup négatif au quatrième trimestre.
L‘l’industrie manufacturière est en baisse en 2024, baisse particulièrement importante dans la fabrication de biens d’équipements et surtout de matériels de transport. La crise du secteur de la construction s’est poursuivie en 2024. Pour la première fois depuis plus de 50 ans, les ventes et les prix baissent simultanément deux années de suite, dans un contexte de taux d’emprunt élevés.
Selon les projections macroéconomiques publiées par la Banque de France en décembre 2024, l’activité resterait ralentie en 2025 avant de se raffermir ensuite. En 2025, La demande intérieure serait affectée non seulement par les mesures de consolidation budgétaire, mais aussi par le contexte de forte incertitude qui les entoure. En 2026, la croissance annuelle rebondirait, favorisée par la détente des conditions financières. Cette détente permettrait à l’investissement privé de contribuer de nouveau positivement à la croissance et la consommation des ménages progresserait à un rythme plus soutenu. En 2027, la croissance annuelle serait proche de celle de 2026.
La situation sur le marché du travail a été particulièrement dynamique depuis la fin de la pandémie. Dans les trimestres à venir, l’emploi s’ajusterait avec retard au ralentissement économique, avec un rattrapage seulement partiel des pertes passées de productivité. Le marché du travail commencerait à entrer dans une phase transitoire de ralentissement, concentrée sur l’année 2025. Le taux de chômage atteindrait un pic inférieur à 8 % en 2025 et en 2026, avant de repartir à la baisse dans le sillage de la reprise de l’activité.
L’inflation totale (IPCH), qui a atteint un pic début 2023, continuerait à refluer : après une moyenne annuelle de 5,7 % en 2023, elle diminuerait fortement à 2,4 % en 2024 et 1,6 % en 2025. Sur l’horizon de prévision, l’inflation s’inscrirait durablement en dessous de 2 %. Le ralentissement des prix serait favorisé par celui des prix de l’alimentation, de l’énergie et des biens manufacturés, tandis que l’inflation dans les services baisserait plus lentement, expliquant un recul plus progressif de l’inflation sous-jacente vers 2 %. Dans un contexte de net reflux de l’inflation, l’Eurosystème a entamé une phase d’assouplissement monétaire. En janvier 2025, le taux de dépôt a reculé de 0,25 point de pourcentage pour atteindre 2,75 %. Il s’agit de la cinquième baisse des taux directeurs depuis juin. Les taux ont reculé au total de 1,25 point de pourcentage depuis leur pic atteint en septembre 2023.
Dans ce contexte, les entreprises de Bourgogne-Franche-Comté interrogées* font état d’une baisse des chiffres d’affaires en 2024. L’industrie et la construction voient leurs carnets de commandes se dégrader tout au long de l’année 2024. Même si un ralentissement est observé, les crédits bancaires accordés aux entreprises de la région continuent de croître. Si les défaillances d’entreprises dépassent leur niveau d’avant-crise sanitaire, les créations d’entreprises restent, en revanche, très dynamiques.
Une croissance modérée de l’activité globale est attendue pour 2025, conjuguée à une baisse des effectifs, avec toutefois un repli de la production du secteur de la construction.
INDUSTRIE : un repli du chiffre d’affaires en 2024, mais une légère progression attendue en 2025.
En 2024, le chiffre d’affaires des entreprises industrielles recule de 1,8 %, sous l’effet d’une baisse des volumes de 2,5 %, déjà en repli en 2023. Seuls les secteurs de la fabrication de matériels de transport et des équipements enregistrent une progression. À l’inverse, l’agroalimentaire et les autres industries connaissent un repli. Les effectifs diminuent de 1,0 %, tandis que la rentabilité s’améliore légèrement.
Les investissements, quant à eux, sont en recul, recul qui devrait se poursuivre en 2025. Cette année, une hausse modérée du chiffre d’affaires est anticipée (+1,5 %) sous l’effet notamment d’une revalorisation des prix de vente. L’ensemble des secteurs industriels serait en croissance. Les effectifs devraient poursuivre leur repli, avec une baisse estimée à 0,8 %.
SERVICES MARCHANDS : légère baisse du chiffre d’affaires en 2024, reprise attendue en 2025.
En 2024, le chiffre d’affaires des services marchands recule de 1,1 %, sous l’effet d’une contraction des volumes de 3,2 %. Les effectifs enregistrent une baisse de 3,0 %. Toutefois, une part significative des entreprises affiche une amélioration de la rentabilité, tandis que les délais de paiement restent stables.
Pour 2025, une reprise de la croissance est attendue, avec une progression du chiffre d’affaires estimée à 1,9 % et une légère augmentation de l’emploi (+0,4 %).
DONT TOURISME ET LOISIRS : une diminution des chiffres d’affaires en 2024. Une stabilité attendue en 2025.
En 2024, le chiffre d’affaires du secteur recule de 5,7 %, et de 8,0 % hors effet prix. Les effectifs enregistrent une baisse de 3,0 %. Pour 2025, une croissance modérée de l’activité est anticipée (+0,1 %), portée par une hausse des prix des prestations. Les effectifs poursuivraient leur repli (-2,5 %).
CONSTRUCTION : une stabilité de la production en valeur en 2024 mais une baisse en volume, baisse qui devrait se poursuivre en 2025.
En 2024, les entreprises interrogées signalent une légère baisse de leur production en valeur (-0,2 %) et un repli plus marqué en volume (-2,5 %). Tandis que les travaux publics et le second œuvre enregistrent une progression, le gros œuvre affiche une baisse. Les effectifs, dans l’ensemble, diminuent légèrement (-0,1 %). Une faible proportion d’entreprises du secteur voit ses délais de paiement et sa rentabilité s’améliorer. En 2025, la production devrait reculer tant en valeur (-1,7 %) qu’en volume (-2,8 %) sur l’ensemble des segments. Les effectifs seraient également en repli (-1,9 %).
*Méthodologie
Enquête réalisée entre novembre 2024 et janvier 2025 auprès d’un échantillon de 1 258 entreprises régionales de l’industrie, des services marchands, des activités de tourisme et de loisirs, et de la construction. Les réponses sont des estimations chiffrées ou des indicateurs de tendance (pour les questions qualitatives). Les données sont pondérées en fonction du poids respectif des secteurs représentés dans la région. Taux de couverture en pourcentage des effectifs régionaux : INDUSTRIE 48,3 %, SERVICES MARCHANDS 15,7 %, TOURISME ET LOISIRS 4,1 %, CONSTRUCTION 24,3 %.
A propos de la Banque de France. Institution indépendante, la Banque de France a trois grandes missions : la stratégie monétaire, la stabilité financière, les services à l’économie. Elle contribue à définir la politique monétaire de la zone euro et la met en œuvre en France ; elle contrôle banques et assurances et veille à la maîtrise des risques ; elle propose de nombreux services aux entreprises et aux particuliers.
Lors de cette conférence, la surprise est venue de la courbe de l'évolution des salaires dans le secteur marchand. Ceux-ci sont passés au dessus de la courbe peu après le début de l'année 2024. Christophe Maurel a bien sûr pris les précautions d'usage en soulignant que les chefs d'entreprises présents avaient sans doute de nombreux exemples individuels montrant une perte de salaire. « Par ailleurs, a-t'il ajouté, il s'agit-là de macro-économie. »...
Côté créations d'entreprises, la progression est continue. Quant aux défaillances, elles reviennent à un niveau d'avant crise covid.