Du type normal, rangé, père de trois enfants, carreleur, D.P., 43 ans, est passé du côté obscur en à peine deux ans. Un renoncement à la vie qui l'a conduit jusqu'au tribunal correctionnel vendredi après-midi.
Entre août 2023 et mars 2024, il commet 8 vols sur les communes de Grièges, Crêches-sur-Saône, Vinzelles, La Chapelle-de-Gunchay, St-Symphorien-d'Ancelles et Chénas. Il se rend aussi coupable de l'encaissement d'un chèque de 1 200 € contre la volonté de la victime.
Étonnamment, ses actes sont commis contre des membres de sa famille et des amis. Contre son voisin également, à qui il vole un vélo dans la cour d'une valeur de 1 000 € pour le revendre et en tirer 50 € !
Actes désespérés d'un homme qui, un beau matin, décide de tout plaquer. « Ma vie ne me convenait pas » dira-t'il dans le box des accusés. La bascule s'est faite il y a 1 an 1/2-2 ans, quand il sombre dans la drogue.
Il ne voit plus ses enfants et s'est séparé de sa compagne depuis plusieurs mois.
Quelques condamnations néanmoins à son actif entre 2005 et 2019, pour défaut d'assurance, conduite sous l'emprise de l'alcool, violence... le mal-être est déjà bien présent. Les choses se calment un peu jusqu'au 5 août 2023, date à laquelle commence la série de vols et de cambriolages, le dernier remontant au 4 mars à St-Symphorien-d'Ancelles.
Il est jusqu'à utiliser une pelle pour voler chez son meilleur ami. Une pierre aussi pour briser une fenêtre et voler console et téléphone. Tout cela pour se payer sa dose : 5g d'héroïne par jour avoue-t'il !
Les gendarmes sont sur sa trace depuis un petit moment. Il a été placé sur écoute. Puis vient le jour où il est interpellé au tout début de ce mois de juillet à Lyon, à bord d'une voiture volée. Il refuse d’obtempérer mais est finalement embarqué et placé en garde à vue, puis incarcéré le 3 juillet.
Devant le tribunal, il reconnaît tout, n'objecte absolument rien et dit au tribunal n'avoir rien à perdre. « Vous m’arrêtez ou vous me tuez » répond-il à la présidente pour faire comprendre son état d'esprit, lâchant aussi que « personne n'a été là quand j'avais besoin. »
Son papa témoigne à la barre pour contre-dire : « J'ai tout fait pour tenter de le sortir de là. » Mais rien n'y a fait. Son ex-belle sœur aussi, constituée partie civile, vient l'interroger : « Pourquoi ?... » Pas de réponse.
L'on comprend que l'incarcération ces deux derniers jours est vécue comme un soulagement. Il est rassuré, il reçoit de la méthadone pour le calmer de son addiction et, devenu SDF selon ses propres propos, il est hébergé... L'on pense aussi à cet instant qu'une autre issue pouvait être le suicide. Finalement, la justice lui sauve la vie en le condamnant à 18 mois de prison dont 8 mois avec sursis probatoire d'une durée de 2 ans. Il a obligation de soins. Le tribunal ordonne le maintien en détention. Les parties civiles, deux seulement, ne l'ont pas accablé, les demandes sont relativement mineures (600 € et un renvoi sur intérêts civils).
10 mois fermes pour tenter de retrouver le goût de la vie.
Rodolphe Bretin