« Personne n’a d’intérêt à s’engager dans une guerre commerciale, pas même les États-Unis », a signifié Laurent Saint-Martin devant un parterre d’entrepreneurs locaux.
Pour son troisième déplacement en région dans le cadre des Assises de la politique commerciale initiées le 18 mars dernier, le ministre délégué auprès du ministre de l'Europe et des Affaires étrangères, chargé du Commerce extérieur et des Français de l’étranger était donc en Saône-et-Loire à la rencontre du tissu économique et institutionnel mâconnais. Ces assises de la politique commerciale ont pour objectif de réunir des entreprises au niveau local, en présence des élus et opérateurs d’État, afin de redéfinir ensemble la doctrine française en matière de politique commerciale d’ici à la fin de l’été. Accords de commerce, priorités sectorielles et géographiques, défenses de nos intérêts stratégiques, accompagnement à l’export, dans un contexte international de plus en plus complexe, le ministre souhaite que chacun puisse y participer et faire entendre sa voix.
Ce vendredi, après la visite de l’entreprise Matawan (plateforme numérique spécialiste du voyage intermodal), il a échangé « avec la plus grande franchise » avec une quarantaine d’entrepreneurs concernés par l’export.
Pour introduire les débats, le ministre a estimé que la hausse des taxes voulue par les États-Unis éclairait d’un jour nouveau les accords commerciaux internationaux comme le CETA (avec le Canada) et le Mercorsur (Avec l’Amérique du Sud) qui ont pourtant été vertement critiqués et autour desquels « le débat politique est brouillon ». Il a également exhorté les chefs d’entreprise à prospecter ailleurs. « Oui, le marché américain est important mais il n’est pas le seul. Allez gagner des parts de marché ailleurs ! J’ai fait des déplacements en Asie du Sud Est, en Amérique du Sud et je vous garantis qu’ils ont envie de produits français ! Quoi qu’il en soit, la position de la France et de l’Europe est claire : on vise la désescalade pour revenir à la vie d’avant. »
Les chefs d’entreprise ont ensuite pu faire part de leurs doléances. Florence Poulet de la société Followers Product a réclamé la création d’un groupe européen dans son secteur d’activité (sécurisation des marchandises). Et elle n’est pas seule à avoir évoqué cette impression de « solitude » et ce besoin de se serrer les coudes entre partenaires d’un même secteur, le fameux « chasser en meute ».
Delphine Da Silva, la directrice export d’Obione (santé animale), a évoqué la concurrence avec des pays européens voisins aux coûts de production plus faibles et les aides financières insuffisantes.
D’autres entrepreneurs signalaient la difficulté de débloquer des aides pour des entreprises de petite taille, la lourdeur administrative qui pèse comme un boulet ou encore la difficulté de démarcher les grands comptes (SNCF, EDF, etc.).
Laurent Saint-Martin s’est voulu résolument optimiste : « La réindustrialisation a commencé. En Bourgogne-France-Comté, on a gagné 400 emplois par trimestre l’an passé, mais ça prendra au moins une décennie pour retrouver le niveau d’avant. Il faut procéder à l’essorage des complexités administratives, éviter les contradictions. C’est une priorité absolue. Il faut libérer les énergies pour aller à l’international. » Et de rassurer les entrepreneurs, les encourager même : « la marque France a une super réputation, ce n’est pour rien si le Maroc a choisi un TGV Alstom.
Ces assises de la politique commerciale aboutiront à la rédaction d’un livre blanc en septembre.
Les vignerons sont inquiets
Qui dit export dit vin. Le ministre a donc fait une escale à la Cité des Climats. Après une visite de l’espace muséographique au pas de course, il a été interpellé par Jérôme Chevalier. Le président de l’Union des Producteurs de Vins Mâcon (UPVM) n’y est pas allé par quatre chemins : « Après les 90 jours, on fait quoi ? » (référence au répit laissé par Donald Trump avant de redéfinir les taxes). Laurent Saint-Martin s’est voulu rassurant : « Le dialogue n’est pas rompu, on peut espérer que ça finisse bien ». Et de préciser que l’UE n’envisageait plus de taxer le Champagne californien ou le Bourbon en rétorsion pour éviter des représailles encore plus fortes contre le secteur des vins et spiritueux. « Le message de la commission européenne à l’administration Trump, c’est que cette hausse tarifaire serait perdant-perdant. Il ne passe pas un jour durant lequel je ne préoccupe pas des vins et spiritueux. Vous êtes quand même le 3ème secteur positif dans la balance commerciale. Et vous êtes une activité non délocalisable. ».
La Bourgogne est très concernée par ce sujet. Une bouteille produite sur 10 est ouverte au pays de la bannière étoilée !
Jérôme Chevalier en a profité pour pester contre les difficultés de parler de vin en France et des invitations renouvelées à la sobriété « qui font du tort à la filière. Laissez-nous faire notre métier ! »
DB
Lors de sa visite, le ministre était entouré des élus locaux : le Député Benjamin Dirx et le maire de la ville Jean-Patrtick Courtois, ainsi que de la représentante de l'Etat, Agnès Chavanon (SG de la Préfecture).
Laurent Saint-Martin attentif aux propos des entrepreneurs
A la cité des climats et des vins, le ministre s'est prêté au jeu des arômes