Ce samedi après-midi, à l’appel du collectif Belles Rives et l’Association Environnement Patrimoine Saint-Laurent, une cinquantaine de citoyens se sont rassemblés sur la place de la République à Saint-Laurent-sur-Saône, entre le pont de Saint-Laurent, classé aux Monuments historiques, et l’ancien hôtel des Ducs de Savoie. C’est en effet à cet endroit que devrait être construit un hôtel qu’ils jugent attentatoire à la qualité architecturale du lieu et à l’intérêt général.

Après avoir installé des ballons pour matérialiser l’impact visuel du projet, plusieurs responsables du collectif ont pris la parole pour expliquer les tenants et aboutissants de leur combat.

Anne Perret, coordinatrice du collectif, a d’abord tenu à rappeler l’historique de la mobilisation : « Le 15 novembre 2021, le conseil municipal de Saint-Laurent a voté la déclassification et la privatisation de la place de la République. Le soir même, le promoteur nous a présenté ce projet d’hôtel, déjà bien ficelé. Dès le lendemain, la demande de permis de construire était déposée en mairie. Il était donc nécessaire que nous nous manifestions contre ce projet de grande ampleur (25m de long, 15 m de large et 15,75m de hauteur) posé entre le pont de Saint-Laurent, et l’hôtel des Ducs de Savoie, emblématiques de l’histoire de notre ville. Nous nous sommes rassemblés en collectif dès le 22 novembre 2021. »

« Ce week-end sont organisées les Journées européennes du patrimoine sur le thème du patrimoine durable. Ouvrez bien les yeux car ici le patrimoine pourrait ne pas durer ! lance en préambule de son intervention Olivier Legroux. Ce projet, on a d’abord cru que c’était un poisson d’avril pendant l’automne, mais non, c’était bien une réalité. »

Un projet d’un autre temps, selon le collectif

Et M. Legroux de poursuivre : « c’est incroyable qu’en 2022, on puisse envisager un projet comme dans les années 50 ou 60 où on a fait beaucoup d’erreurs en matière d’urbanisme. Il suffit d’ouvrir les yeux : le Saint-Laurent médiéval a été rasé, les halles ont été démontées, et regardez en face la tour des archives et le plateau de la Baille. Durant ces années, on y est pas allé avec le dos de la cuillère. En 2022, la proposition c’est de recommencer, en coulant du béton devant un monument historique ! »

Plusieurs recours auprès du tribunal administratif

« On a attaqué le permis de construire en déposant 2 recours gracieux et un recours contentieux auprès du tribunal administratif, indique M. Legroux. On a attaqué sur le non-respect d’un certain nombre de règles d’urbanisme. On verra si le juge nous donne raison ou pas. »

Le collectif a également contraint la mairie de Saint-Laurent à ouvrir une enquête publique « pourtant obligatoire et prévue par la législation ». Une enquête qui s’est soldée par un avis favorable au projet, une décision que conteste le collectif : « Le commissaire enquêteur a écarté tous les arguments en faveur du patrimoine, en disant que cela ne le concernait pas. Son analyse est nulle et non avenue. »

Intérêts privés contre intérêt général ?

« Nous sommes face à une coalition d’intérêts privés, estime Olivier Legroux. Ceux d’un investisseur et d’un vendeur. Cet espace c’est l’identité de Mâcon et de Saint-Laurent, ça appartient à tout le monde : les Mâconnais le voient en permanence et les Saint-Laurentins y passent tous les jours. C’est donc important qu’on puisse préserver cet espace public et qu’on réfléchisse ensemble à ce qu’on peut en faire ».

Un projet d’un intérêt économique tout relatif, selon le collectif

Si le collectif ne nie pas l’intérêt économique de l’opération, il tient néanmoins, par la voix d’André Prost, à en nuancer l’impact : « Cet hôtel ne sera pas le poumon économique comme on veut nous le faire croire », citant en exemple les difficultés actuelles des hôteliers mâconnais à remplir leurs établissements.

Préserver le passé pour préserver l’avenir

« Notre objectif unique c’est la sauvegarde du patrimoine, la sauvegarde du pont et celle de l’hôtel, ajoute M. Prost. Nous disons haut et fort qu’il faut préserver ces deux édifices historiques. L’Architecte des Bâtiments de France, le maire et le promoteur se battent avec leurs armes. Nous, nous luttons avec nos convictions pour préserver l’avenir. Nous préservons le passé pour permettre à l’avenir d’être harmonieux. On a l’habitude de dire aujourd’hui qu’il faut donner du sens. Donner du sens à Saint-Laurent c’est préserver son patrimoine, c’est vivre dans des conditions satisfaisantes avec un regard qui ne soit pas altéré par des bâtiments qui n’ont rien à faire là où on veut les mettre. »

A l’issue des déclarations, les personnes présentes ont chanté « Les riverains de la place publique », sur l’air de la chanson de Georges Brassens, Les Amoureux des Bancs Publics, avant de se disperser.

David Delecroix

Les ballons devaient matérialiser l'impact visuel du projet d'hôtel. Le vent a joué les troubles fête.

Anne Perret

Olivier Legroux

Le projet d'hôtel devrait masquer l'hôtel des Ducs de Savoie, datant du XVème ou XVIème siècle

André Prost