Le cru saint-veran joue désormais dans la cour des grands. La future gouvernance aura à entretenir la dynamique.

Kevin Tessieux est encore président de l’Union des producteurs de saint-veran pour quelques jours. Il quittera ensuite le bureau entraînant l’élection d’un nouveau président. Il peut se retourner satisfait sur ses huit années de mandat, riches en émotions.

L’organisation de la Saint-Vincent tournante en 2018 aura sans doute été le moment le plus marquant : « mobiliser 600 bénévoles et attirer 83 000 personnes sur deux jours, c’est fort. Ce n’était que du positif » se souvient-il avec émotion. L’événement a fait du saint-veran une appellation qui compte, y compris à l’international. »

Autre temps fort, la célébration l’an passé du 50ème anniversaire de l’appellation où musique, vin et bande dessinée ont fait bon ménage avec la publication d’une BD entièrement consacrée au cru (par les Éditions Bamboo, dans leur collection dédiée au vin : Les fondus).  « C’était une belle fête mais aussi un prétexte pour entretenir de la cohésion sociale entre vignerons, riverains. »

La qualité récompensée

L’axe de travail des dernières années a été la montée en gamme avec la perspective de la création des 1ers crus (comme chez les « voisins » de pouilly-fuissé) c’est-à-dire des climats identifiés comme plus qualitatifs et reconnus comme tels par l’INAO. "Attention, ce ne sont pas les 1ers crus qui vont entraîner la montée en gamme, mais la montée en gamme qui est sanctionnée par la reconnaissance en tant que 1ers crus", insiste le président. Mais il ne se hasarde pas à fixer une date, une échéance, le temps de l’administration française garde ses secrets…

Forte de ses 200 opérateurs, "avec un noyau dur d’une trentaine de vignerons, dont la coopération" et de ses 730 hectares, l’appellation se porte bien. Elle est très demandée tant sur le marché domestique qu’à l’export (Benelux, Royaume-Uni, USA et Canada), son prix oscille autour de 1 900 euros la pièce. Kevin Tessieux a conscience des enjeux que cela implique. "Nous devons rester cohérents sur les prix, collectivement. On a changé de catégorie, le cap n’est pas toujours facile à passer."

Pourtant, il existe quand même quelques motifs de vigilance à commencer par le climat et ses aléas qui rendent les volumes de récolte incertains et donc le pilotage économique des exploitations très compliqué. "Cela peut dissuader les structures d’investir", regrette l'exploitant du domaine des 2 roches.

Autre menace : la flavescence dorée, phytoplasme véhiculé par la cicadelle, qui met en péril la santé des ceps. "Elle est à nos portes, on ne peut pas se voiler la face". Il y aura certainement des traitements insecticides obligatoires à prévoir mais aussi de la prospection tant collective qu’individuelle pour contrôler l’évolution des foyers.

Dernière inquiétude, et non des moindres, les exploitations peinent à trouver de la main d’œuvre "même en proposant de bons salaires".

Il est trop tôt pour faire des pronostics sur la récolte 2023 mais celle de l’année précédente est satisfaisante après un millésime 2021 qui avait été plus chaotique. "L’objectif est de reconstituer un stock suffisant pour éviter une tension sur les marchés ", poursuit le vigneron qui quitte son poste avec le sentiment du devoir accompli. "J’ai pris beaucoup de plaisir à organiser tous ces événements. On a beaucoup insisté sur la communication et l’appellation s’est bien développée ces dernières années."

David Bessenay